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« INVESTIR POUR ÉCONOMISER SUR LA CONSOMMATION ÉLECTRIQUE »

À la suite de ces investissements, la consommation électrique totale du bloc de traite du Gaec du Tertre de Villeray a baissé de 38 % et s'élève désormais à 4,43 €/1 000 l.PHOTOS : © J.P.

DES AMÉNAGEMENTS INTÉRIEURS, COUPLÉS À L'ACHAT D'UN PRÉREFROIDISSEUR ET D'UN RÉCUPÉRATEUR DE CHALEUR, ONT PERMIS AU GAEC DE RÉDUIRE LA FACTURE ÉNERGÉTIQUE DU BLOC DE TRAITE.

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LA QUESTION D'INVESTIR POUR RÉDUIRE LA CONSOMMATION ÉLECTRIQUE du bloc de traite s'est posée en 2010, lors de mon installation sur l'exploitation familiale, explique Charlie Maurice. La conversion en lait des primes vaches allaitantes et la rallonge de quota obtenue à cette occasion portaient alors notre droit à produire de 600 000 à 1 million de litres. Une situation qui nous a conduits à remplacer le tank de 4 200 l, alors propriété de la laiterie, par un tank en propre d'une capacité de 10 115 l. » À cette occasion, les associés ont sollicité le Clasel (Contrôle laitier de la Sarthe et de la Mayenne) pour réaliser le diagnostic de consommation électrique de leur installation de traite.

Le contexte de resserrement des marges et de renchérissement du coût de l'électricité justifie pleinement cette volonté d'optimiser le rendement énergétique d'une installation qui pèse, en moyenne, 80 % de la consommation électrique d'une exploitation laitière, soit environ 6 €/1 000 l. Conseiller spécialisé du Clasel, Jean-Paul Thuard a donc, dans un premier temps, relevé la consommation des différents éléments du bloc de traite à l'aide de compteurs. Ceux-ci révèlent que la consommation du tank pour refroidir le lait s'élève à 23 kWh/1 000 l, celle du chauffe-eau à 36,1 kWh et celle cumulée de la pompe à vide, du roto de 24 places, de la pompe à lait, de l'éclairage et de la machine à laver de la laiterie à 19,9 kWh. La consommation totale du bloc de traite est de 79 kWh, soit un coût de 6,45 €/1 000 l. C'est à partir de ces relevés que le conseiller va proposer différents équipements visant à réaliser des économies, compatibles avec l'installation existante.

Bien que la consommation du tank se révèle proche de la moyenne (22 kWh), la priorité pour l'exploitation portait sur l'achat d'un prérefroidisseur, car l'augmentation du quota devait naturellement s'accompagner d'une hausse du coût lié au refroidissement du lait. Il existe deux catégories de prérefroidisseur : à plaques et tubulaire. D'après les tests réalisés par le GIE lait-viande de Bretagne, l'économie générée varie de 28,1 à 53,8 % selon les modèles, la pression et la température de l'eau.

« UNE PRIORITÉ : LIMITER LA CONSOMMATION DU TANK »

« Les prérefroidisseurs à plaques requièrent un débit d'eau important, voire un variateur sur la pompe à lait pour augmenter le temps d'échange, explique Jean-Paul Thuard. Sur la ferme, avec un volume de lait pendant la traite supérieur à 1 000 l/h et une distance de 25 m entre le roto et la laiterie, le prérefroidisseur tubulaire linéaire de la société Charriau paraissait le plus adapté (voir photo). Simple d'usage, évolutif et économe en eau, il a été testé à 52 % d'économie d'électricité sur la consommation du tank. » Sur cette base, compte tenu d'un coût de l'énergie en heures pleines à 0,0967 €/kWh, d'un investissement de 9 900 € et des 40 % d'aides prévues dans le PPE (plan de performance énergétique), le retour sur investissement est évalué à 5,2 ans pour un quota d'un million de litres. Avec le quota de 600 000 l, le retour sur investissement pour le Gaec aurait été de 8,6 ans.

« UN NOUVEAU TANK ÉQUIPÉ DE DEUX ÉCHANGEURS À PLAQUES »

Dans un deuxième temps, pour économiser de l'électricité au niveau du chauffe-eau, très énergivore, le conseiller évalue l'opportunité d'installer un récupérateur de chaleur (voir photo). Le but de cet équipement, comme son nom l'indique, est de récupérer la chaleur du groupe frigorifique du tank, pour chauffer de l'eau entre 50 et 55°C, qui sera stockée dans un ballon intermédiaire, lui-même raccordé au chauffe-eau de l'exploitation chargé de faire l'appoint en température (voir photo). Selon les modèles, le volume de lait mais aussi la température de l'eau du réseau et du lait à son arrivée dans le tank, l'économie électrique permise par ce procédé sur le fonctionnement du chauffe-eau varie de 60 à 90 %. Dès lors, compte tenu d'un investissement de 3 450 € (avec 40 % d'aides PPE) et d'un coût de l'énergie en heures creuses prévues dans le contrat EDF de 0,0642 €/kWh, le conseiller évalue le retour sur investissement à 4,3 ans (5,7 ans pour 600 000 l). « À l'issue du diagnostic, nous avons décidé d'acquérir un prérefroidisseur tubulaire linéaire de marque Charriau, et un récupérateur de chaleur de 500 l », explique Charlie Maurice.

Après l'installation de ces équipements sur l'exploitation, de nouvelles mesures ont permis de contrôler les consommations électriques réelles du bloc de traite. « Grâce au prérefroidisseur, on constate une réduction de 56 % de la consommation du tank, soit une économie pour le Gaec de 1 360/an ou de 1,39€/1 000 l », analyse Jean-Paul Thuard.

Cette performance s'explique par la longueur du tubulaire parfaitement adaptée au débit de la pompe à lait, ce qui permet un échange thermique lait/eau optimal. Ainsi, le lait arrive directement dans le tank à une température de 13 à 14°C. Mais la très bonne efficacité du prérefroidisseur ne permet pas d'exprimer pleinement le rendement attendu du récupérateur de chaleur, car il y a naturellement moins de calories à récupérer sur le fonctionnement du tank. « Par rapport à l'ancienne situation, la consommation du chauffe-eau a néanmoins diminué de 52 %, soit une économie estimée à 524/an. Dans un souci d'optimisation, il conviendrait peut-être de faire contrôler le réglage du groupe de froid par un frigoriste. Au total, à la suite de ces investissements, la consommation électrique totale du bloc de traite a baissé de 38 % et s'élève désormais à 4,43 €/1 000 l. »

« 40 % DE SUBVENTIONS SUR LES INVESTISSEMENTS »

Reste à évaluer l'impact du prérefroidisseur sur le coût d'entretien du tank et la facture d'eau. En effet, la baisse de pression de fonctionnement du tank sous-entend une moindre usure des compresseurs, mais une réflexion préalable sur l'utilisation de l'eau tiède à la sortie du prérefroidisseur est nécessaire pour éviter les gaspillages. « Nous avons retenu la solution qui consiste à distribuer l'eau tiédie aux animaux qui l'apprécient énormément en période hivernale, constate Charlie. Elle est stockée dans deux réservoirs intermédiaires étanches (d'anciens tanks à lait achetés d'occasion) pour éviter tout risque de contamination bactérienne. Ils sont placés en hauteur pour alimenter par gravité deux abreuvoirs à niveau constant. Nous réfléchissons à une deuxième sortie d'eau vers notre surpresseur pour le lavage des quais en été, car nous avons un excès d'eau pendant la période de pâturage. »

Si l'on comptabilise le prix des équipements matériels et des aménagements intérieurs réalisés pour l'isolation de la laiterie ou l'aération des condenseurs du tank (voir photo), le montant des investissements réalisés par le Gaec s'élève à 17 131 €. À ce titre, les associés ont bénéficié d'une aide financière de 500 € d'EDF et de 7 195 € de subventions dans le cadre du PPE. Le taux des subventions prévu par ce dispositif pour les équipements d'économie d'énergie est fixé à 30 % (40 % pour les JA), à condition d'avoir réalisé un diagnostic d'un coût d'environ 1 000 €. Un guichet unique est mis en place au niveau des directions départementales de l'agriculture. Cependant, depuis 2013 les crédits alloués au PPE ont considérablement diminué et, en Pays de la Loire, les projets laitiers ne sont plus prioritaires, sauf s'ils sont portés par des JA. C'est pourquoi, en dehors de ce cadre administratif, le Clasel propose un service de diagnostic et de conseil au tarif de 250 € la demi-journée. Ses conseillers en énergie sont par ailleurs sollicités pour vérifier le montage de prérefroidisseurs dont les performances ne sont pas au rendez-vous.

JÉRÔME PEZON

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